Arnauld GELIS

 

En 1320, l'Evêque Jacques Fournier ( qui plus tard deviendra Pape sous le nom de Benoît XII en 1334 ) est inquisiteur ordinaire à Pamiers dépendant du Tribunal de l'Inquisition de Carcassonne.

Il s'intéresse à un certain nombre de superstitions et conduites religieuses déviantes. Son registre d'inquisition en latin est déposé à la bibliothèque Vaticane, Lat MS. 4030, des éditions modernes sont disponibles en latin et français. La traduction intégrale en anglais n'est plus disponible sur Internet mais en voici une sauvegarde. C'est une précieuse source de renseignements sur la mentalité et la vie quotidienne des hommes et femmes de cette époque.

Jacques Fournier examine le cas d'Arnaud GELIS, dit  "le bouteiller Bouteiller n. m. XIIe siècle, boteillier. Du latin médiéval buticularius, désignant un des grands officiers de Cour, dérivé de but(t)icula (voir Bouteille).Anciennt. Échanson. Grand bouteiller de France, grand officier de la couronne, qui avait l'intendance des boissons (on dit aussi Boutillier). ", de la paroisse de Mas-Saint-Antonin qui exerçait l'activité d'armier (ou entremetteur d'âmes), c'est à dire truchement entre les vivants et les morts.

Son surnom a largement été traduit par " l'ivrogne". Cette connotation péjorative ne correspond pas forcément à la réalité. Le don d'armier n'était pas si rare, et cette activité était assez bien vue par les curés de campagne auxquels elle rapportait des messes pour les défunts.

Toujours est il qu'Arnaud confesse avoir été le familier et le domestique de Hughes de Durfort, chanoine de Pamiers, mort vers 1312, et qu'il a pris conscience pour la première fois de son don cinq jours après le décès de son maître. Peut être a-t-il été poussé par la nécessité de trouver une source de revenus de substitution, et tout naturellement s'est tourné vers la consolation des affligés, occupation relativement distinguée pou un ancien commensal des puissants.

Cet Hugues de Durfort fait partie de la famille des Comminges. Ce n'était pas un petit personnage . Durfort était un riche fief situé à l'ouest de Pamiers. Arnaud Gélis n'était probablement pas non plus un valet quelconque, mais peut être un cadet de famille obligé de servir pour assurer son existence. Il existe d'ailleurs un château Gélis en ruine à proximité du village de Durfort.

Dans sa confession, Arnaud donne quelques indications sur sa famille, et mentionne un fils Raimond, âgé de six à sept ans (donc né vers 1314).

On peut penser qu'Arnaud était né vers 1275, qu'il est entré à l'âge de vingt ans au service de Hughes de Durfort, où il est resté un peu moins de vingt ans, et qu'il a eu son fils Raimond après le décès de son maître et la perte de sa position.

Au terme de sa copieuse et passionnante confession, Arnaud rétracte toutes les hérésies qui lui étaient reprochées. La sentence du tribunal de l'Inquisition prononcée le 30 avril 1320 ne nous est pas parvenue. On peut penser que si Arnaud a échappé au bûcher, il a fini ses jours (sans doute assez rapidement) au pain et à l'eau dans les geôles de quelque couvent.

Ce qui est advenu de sa famille reste du domaine des conjectures.