CHAPITRE I
Introduction
Pourquoi écrit-on ? Pour communiquer j'imagine. Avec
d'hypothétiques lecteurs bien sûr. Avec
soi-même peut-être. Comme on le verra
j'espère dans le texte qui suit, la communication est le
moteur du développement de la pensée.
J'espère que mes propos vous aideront à
structurer vos réflexions comme ils m'ont aidé
à structurer les miennes.
En 2007, j'ai écrit un petit texte "La nature des choses"
dans lequel j'essayais de faire le point sur les théories
généralement admises et quelques autres,
relatives à "ce qu'on pourrait appeler la conception du
monde". N'étant un spécialiste de rien, je
cherchais à m'instruire par l'expérience et
l'opinion des autres. Il est difficile à un ignorant d'avoir
sa propre conception de l'univers car " le monde dont nous pouvons
parler n'est pas le monde en soi, mais le monde dont nous avons un
savoir."
En 2008, à la suite de divers échanges de
réflexions et de notes de lecture avec des amis de tendances
diverses, j'ai éprouvé le besoin de continuer la
réflexion sur ce thème éternel depuis
que l'homme pense : l'univers et moi.
Comme "Le zéro et l'infini" était
déjà pris, j'ai adopté comme titre "Le
fossile pensant". J'aime ce titre parce qu'il rappelle à la
fois nos lointaines origines bactériennes, nos origines
animales, notre vocation de mortel donc de fossile en puissance, mais
aussi la capacité implicite d'immortalité que
nous confère la pensée.
S'ils me lisaient, les spécialistes : philosophes ou
théologiens, savants et chercheurs en sciences de la vie et
particulièrement les neurosciences, trouveraient un
coté naïf et peut-être des erreurs de
compréhension de leurs écrits. Qu'ils m'en
excusent d'avance.
CHAPITRE II
Une approche
spiritualiste
La réflexion ci-après fait suite à la
lecture du recueil des conférences données de
1977 à 1985 par Claude Tresmontant, "L'histoire de l'univers
et le sens de la création" dont on trouvera un
résumé en annexe.
Quand on observe, avec le recul de l'Histoire, l'accumulation des
connaissances techniques de l'Homme sur le monde environnant, sur
l'intimité de la matière et de
l'énergie, sur une certaine intimité avec le
vivant, il apparaît comme une évidence que la
Nature se révèle infiniment complexe. Plus nous
augmentons notre pouvoir sur de nouvelles choses, inertes ou vivantes,
plus leur nature profonde se dérobe à nous, plus
la Nature globale semble se défendre contre nos
ingérences là où on ne l'attend pas.
Dans le domaine du vivant, même si le "hasard et le
nécessité" des plus purs tenants de
l'évolutionnisme, ont fait leur œuvre au cours des
ères passées, l'observateur logique ne peut
s'empêcher de croire que quelque principe sous-jacent a
présidé et préside encore à
toutes ces merveilles.
Dans le domaine de l'inerte, la propriété
d'auto-organisation observée dans nombre de
systèmes ouverts ( Prigogine) est proprement
stupéfiante.
La capacité à maintenir
l'intégrité d'un ensemble complexe et
à faire coopérer tous ses
éléments est admirable.
Certains vont l'appeler Grand horloger, Dieu ... un de mes amis a dit
avec des majuscules Réalité, Cause, Principe,
Père ... d'autres parlent de Nature profonde des choses,
Etre, Esprit du monde ... Pour ma part, écartant
le vocable Réalité, qui peut faire confusion avec
(affreux jargon) chosalité , je
préfère Principe Fondateur, Principe Universel.
Nous sommes en bonne compagnie, puisque beaucoup d'esprits
éclairés, chacun avec les connaissances de son
époque, ont admis et admettent encore que le monde est
régi par un Principe Universel.
Mais quel est ce Principe ? Pouvons nous le connaître ou au
moins en avoir l'intuition ?
Il me semble que bien des textes relatifs à ce sujet sont
trop anthropocentriques, voire anthropomorphiques, et attribuent
à ce Principe Universel des qualités qu'il n'a
peut être pas, ou pas comme le croit le commun des mortels.
Par exemple, la toute-puissance. Le croyant de base, depuis les temps
les plus reculés et dans pratiquement toutes les religions,
interprète ce terme comme la capacité,
attribuée à la Divinité, d'intervenir
favorablement pour celui qui l'adore et défavorablement dans
le cas contraire.
De punir les sacrilèges, on passe rapidement à
punir les infidèles, puis tout simplement les ennemis
ordinaires du croyant. Nombre d'invocations et de psaumes attestent
cette vision de la toute-puissance de Dieu.
Une toute-puissance qui s'exercerait seulement par le maintien jaloux
des lois de l'universalité et de la complexité
impénétrable ne frappe pas les esprits. Et
pourtant des générations de chercheurs en font
l'expérience, ce qui permet de croire qu'il y a non
seulement une Cause Première mais un Principe Universel
Permanent agissant "hic et nunc" sur le Réel.
On pourra lire le petit conte, plus profond qu'il n'y parait,
"Le naturel et le Surnaturel" relevé sur le site de Serge
Carfantan.
"Ici et maintenant". Mais "maintenant" c'est aussi demain. L'Homme si
sensible au temps qui passe se pose sans cesse la question.
Les tenants de la thèse darwinienne parlent des accidents de
parcours aléatoires, perpétués et
propagés par la sélection naturelle des formes
les plus aptes. Mais la survie des formes les plus aptes, n'est ce pas
le Principe Universel de conservation qui couvre ainsi l'avenir?
D'autres thèses disent qu'il y a une finalité
dans l'évolution de l'Univers ou tout au moins dans le monde
vivant. Ce qui revient à dire que le futur oriente, au moins
pour partie, le présent. On pressent que le Principe
Universel doit être intemporel.
Si le monde réel, en particulier le vivant, a deux attributs
: l'étendue et la durée, on pourrait admettre que
le Principe Universel n'a pas de dimension temporelle, ce qui
correspond à l'attribut d'éternité.
Ceci étant dit, certaines observations débouchent
sur une cosmologie dans laquelle l'univers réel se comporte
comme un système où les distances entre
îlots de matière s'accroissent constamment,
cependant que la matière des îlots se densifie et
se complexifie. Les atomes de matière
élémentaire se constituent par étapes,
de l'hydrogène aux atomes lourds.
Examinons de plus près. Un noyau d'uranium est plus complexe
qu'un noyau d'hydrogène. Mais l'observation et le calcul des
éléments transuraniens semblent montrer qu'il y a
des limites à cette complexification, qui se paye en terme
de stabilité. C'est une piste pour approcher l'attribut
"étendue" du Principe Universel. Au delà d'un
certain seuil, il ne complexifie plus, il dissocie, il
détruit l'étendue. La fusion compose les noyaux
légers en noyaux plus lourds, la fission résout
les atomes lourds en atomes légers.
On rejoint les philosophies hindouistes. Le Principe Universel serait
à la fois créateur, conservateur et destructeur.
L'attribut "étendue", dont nous autres humains avons une
conscience immédiate, est-il alors pertinent pour approcher
le Principe Universel ?
Peut-être devrait-on plutôt retenir la
capacité à maintenir non pas
l'intégrité du Tout, mais la relation entre les
parties qui constituent le Tout. Ce serait un attribut d'information
(capacité de connaître) et d'énergie
(capacité d'agir). Au commencement était le
Verbe, le Verbe était avec Dieu, le Verbe était
Dieu...
En conclusion, qu'ils proviennent des traditions hindouiste,
hébraïque, chrétienne et Johanique, on
ne peut qu'être en admiration devant les
témoignages qu'a reçus l'humanité. Et
si nous faisions partie de deux tiers des hommes qui suivent d'autres
traditions, nous ajouterions ceux du Taoïsme, du Bouddhisme et
de l'Islam.
Comme dit si bien Théodore Monod << Il est une
montagne unique. Nous la gravissons les uns et les autres par des
sentiers différents avec l'espoir de nous retrouver un jour
au sommet, dans la Lumière et au-dessus des nuages.
>>
CHAPITRE III
Une approche
positiviste
La réflexion ci-après fait suite à la
lecture du livre de Jean-Pierre Changeux « L’homme
de vérité » et du livre de Claude
Allègre « La défaite de Platon, ou la
science au XXème siècle - chapitre XI» .
I.
Le
vivant est-il spécial ?
Par spécial entendons quelque chose dont les
propriétés se posent en rupture de
continuité avec le reste de l’ensemble
considéré, en l’occurrence avec le
reste de l’univers.
1.
Spécificité du vivant
Un organisme vivant est composé de cellules individuelles
qui comportent une frontière avec le monde
extérieur. Le vivant est le règne de
l’individualité, avec des mécanismes de
maintien à court terme des conditions intérieures
en dépit des variations des conditions ambiantes.
Exposée aux fluctuations, voire aux agressions, du monde
extérieur, la cellule défend son
intégrité. On dit qu’elle est
dotée de la capacité
d’homéostasie.
Le vivant échange en permanence de
l’énergie avec le monde extérieur sous
forme de rayonnement solaire et de composés chimiques, il
rejette des déchets.
Les cellules qui composent le vivant naissent et meurent. Par divers
mécanismes, elles cherchent à se maintenir sur
des durées dépassant la durée de
vie des cellules individuelles. C’est la
reproduction cellulaire. Le vivant est le règne de la
filiation.
Si le vivant rencontre des conditions favorables, il
prolifère dans l’espace, sinon il peut prendre des
formes réduites ou ralenties pour attendre des jours
meilleurs.
Par les mécanismes de la reproduction et par les
mécanismes d’adaptation, le vivant maintient son
existence à travers les générations;
il y a concomitamment création de nouveauté et
élimination des solutions les moins performantes.
C’est l’évolution des espèces.
2. Que
pouvons nous observer ?
Nous pouvons étudier le vivant existant à notre
époque et constater sa très grande
diversité depuis les formes unicellulaires, les
végétaux, le règne animal y compris
l’espèce Homo.
Nous pouvons aussi étudier les traces matérielles
qu’ont laissées les
générations antérieures sous forme de
fossiles.
Nous avons découvert les « lois » de
l’hérédité et les
« tendances » à la superposition des
stades de sophistication de certains organes. Le vivant semble se faire
une spécialité des processus cumulatifs.
Dans les premières études
expérimentales du vivant, nous avons aussi
observé que le vivant est fait de la même
matière que le reste du monde inerte,
matière qui a fait l’objet
d’étude par ailleurs.
Depuis une trentaine d’années, diverses branches
des sciences de la vie s’attellent à combler le
fossé entre la chimie moléculaire et la cellule
vivante la plus simple. Nous accumulons détail sur
détail, donnant l’impression de remplir le tonneau
des Danaïdes. La moindre parcelle de vivant est infiniment
plus complexe que la chimie élémentaire et la
physique atomique.
3.
Spéculations
Considérant la très grande amplitude de
conditions physiques qui règne dans l’univers, il
apparaît que le vivant ne se développe que dans un
tout petit domaine. Celui qui permet aux liaisons chimiques les plus
fugitives de se faire et de se défaire ; plus
particulièrement, les conditions de température
et de pression qui maintiennent l’eau liquide.
Il est courant de dire que dans le cosmos tel que nous
l’appréhendons maintenant, il doit y avoir de
nombreuses autres planètes où les conditions
d’apparition de la vie sont réunies.
On pourrait même imaginer que - même si
l’eau H2O reste le solvant polaire de prédilection
- d’autres molécules telles que SO2, SH2, NH3 etc.
pourraient avoir joué le même rôle.
4. Limites
Revenons sur terre et examinons ce qui se passe aux confins du vivant
et du non-vivant.
On peut lister – sans prétendre être
exhaustif - divers systèmes par ordre de
complexité croissante :
Molécules minérales
Cristaux minéraux
Molécules organiques simples
Macromolécules organiques
Protéines
Virus
Organismes unicellulaires reproduction par mitose
Organismes pluricellulaires reproduction sexuée
etc.
Il semble que la limite entre le vivant et le non-vivant soit assez
conventionnelle, probablement parce que le vivant échange en
permanence avec le non-vivant.
A cette réserve près, on peut dire que la vie est
un îlot d’organisation extrêmement
spécial.
II. L’espèce HOMO est-elle spéciale ?
1. Comment
l'esprit vient aux filles (et aux garçons)
La trace du vivant la plus ancienne que nous connaissions (une
bactérie fossile) remonterait à plus de 3
milliards d’années.
Beaucoup, beaucoup plus tard, dans l’évolution des
espèces, nous trouverons homo sapiens. Il résulte
d’un certain nombre de ruptures au sein de la branche
australopithèque, homo habilis , erectus,
néanderthal, sapiens…
Par un accident de la Nature, il y a plus d’un million
d’années – peut être en
conséquence d’un
rétrécissement du bassin dû
à la station bipède – il est
apparu une sorte de singe à gestation longue, mais qui
donnait le jour à une grande proportion de
bébés prématurés. Pour des
raisons obscures – parmi lesquelles, l’amour
d’une mère frustrée n’est pas
à écarter – certains individus ont
survécu, mais pour ce faire ont
déployé des trésors
d’ingéniosité afin de compenser leur
faiblesse congénitale. Au moins deux de ces fœtus
vivants, mâle et femelle, sont parvenus à
l’âge adulte et ont pu se reproduire. Il a fallu
encore quelques centaines de milliers d’années
pour que leur crâne et leur mâchoire changent de
géométrie, permettant à leur cerveau
de devenir plus gros et surtout plus complexe.
Peut être sous l’effet de quelque
réchauffement climatique, le caractère immature
des bébés s’est accentué,
pas tellement in utero que par l’allongement de la
période de croissance et d’ossification de la
boite crânienne. Le nombre de neurones et surtout
le nombre des connexions cérébrales
développées après la naissance
– donc sous l’influence de l’interaction
entre le bébé et son environnement –
s’est considérablement accru.
Un beau jour sont apparus quelques bébés
surdoués de la cervelle, mais présentant une
malformation du larynx. Pour surmonter ce handicap, ils ont
dû passer outre la communication gestuelle et le petit
répertoire de grognements de leurs parents. Ils ont
utilisé pour la première fois un
véritable langage articulé. Amenés
à leur tour à se reproduire, ils ont
propagé la malformation vraisemblablement inscrite dans
leurs gènes et transmis le langage articulé par
l'apprentissage postnatal. Ils sont à
l’origine de la pensée conceptuelle et du
raisonnement abstrait.
Plus récemment, le développement de la
pensée conceptuelle, engendrée par la
communication entre deux individus face à face, a fait un
grand pas en avant avec l’invention de
l’écriture (6000 BP Before Present), qui a permis
la confrontation entre beaucoup plus d’individus, dans
l’espace et surtout dans le temps.
L’écriture était, au
départ, un simple outil de dénombrement
des troupeaux et des récoltes ; elle est devenue ensuite un
outil de calcul des surfaces cultivées et ce qui en
découle.
Elle s’est enrichie par la représentation
pictographique des objets rencontrés dans la Nature, astres,
végétaux, animaux…
Elle a franchi un pas en devenant idéographique, le
pictogramme astre = soleil signifiant aussi durée =
journée. Encore un autre pas quand on a inventé
le langage phonétique associant la prononciation de
plusieurs pictogrammes enchaînés pour obtenir des
mots ayant un rapport plus ou moins lointain avec les pictogrammes
constitutifs. Ces systèmes perdurent pour les Chinois et les
Japonais. Ils nécessitent la mémorisation
d’un assez volumineux dictionnaire de signes, ce qui
n’est pas sans incidence sur le développement
cérébral de ces populations.
Encore un autre pas important, quand on a inventé les
systèmes alphabétiques, dans lesquels un nombre
réduit de signes écrits permet
d’exprimer un nombre quasi illimité de concepts.
2. Le
bébé moderne
Le petit d'homme fait l'objet de diverses sciences
expérimentales : génétique,
embryologie, psychologie pédiatrique etc. Les
caractéristiques des autres espèces animales sont
également étudiées.
Intéressons nous seulement aux aspects concernant le
développement des capacités
cérébrales chez l'homme.
Selon Piaget, le développement de l'intelligence fait
intervenir 3 séries de facteurs :
- La maturation neurologique
- L'exercice et l'expérience acquise dans l'action
effectuée sur les objets
- Les interactions et les transmissions sociales.
Dans un article de vulgarisation très
intéressant, Claude Allègre écrit: "
On suppose que, durant la période où le cerveau
se développe, c'est-à-dire dans l'enfance, le
réseau neuronal se modifie considérablement.
Certaines cellules naissent, mais d'autres meurent. Des connexions
disparaissent, d'autres se forment ... Cette mise en place des circuits
neuronaux est le résultat de l'apprentissage. Parmi toutes
les connexions possibles, le jeune cerveau sélectionne
celles qu'il utilise, et laisse mourir celles qui ne servent pas ...
Dans le célèbre débat entre
inné et acquis, on peut affirmer aujourd'hui que, sans
négliger le rôle de l'inné, celui de
l'acquis est fondamental. "
3. Le
fossile est toujours vivant
Les efforts de diverses sciences expérimentales tendent
à montrer que la mise en place et le
développement des capacités
cérébrales de chaque être humain actuel
reproduit plus ou moins, en un raccourci temporel extraordinaire, les
étapes du développement du vivant depuis son
apparition sur la terre.
Comme si les banderoles génétiques sur lesquelles
sont inscrites les instructions qui commandent la construction de notre
organisme étaient faites d'archives d'époques
différentes, mises bout à bout et lues
dans l'ordre chronologique.
En conclusion, bien que homo sapiens soit en de nombreux points,
génétiquement et physiquement, en
continuité avec le reste du vivant et
particulièrement les vertébrés, il en
diffère énormément par les
capacités fonctionnelles de son cerveau.
III.
La conscience humaine est-elle spéciale ?
En premier il faut s’entendre sur ce qu’on
désigne par conscience.
1. La
conscience ordinaire
Elle s'étend de la perception du monde sensible à
la création et à l'utilisation des concepts les
plus abstraits.
On peut en faire une approche scientifique, c’est
l’objet des neurosciences, qui accumulent depuis 1970 du
savoir de façon spectaculaire, au point
d’être capables de prendre des images
grossières de ce qui se passe dans notre cerveau quand nous
exerçons telle ou telle activité intellectuelle.
Pour les chercheurs en neurosciences, il y a corrélation
entre des états d’activité complexes
dans le cerveau des individus qui perçoivent, pensent,
réfléchissent sur eux-mêmes et
communiquent avec les autres par la mimique, la parole et
l’écrit.
Pour le moment on estime à cent milliards (10 Exp 11)
le nombre de neurones et à un million de milliards (10 Exp 15) le
nombre de connexions synaptiques entre neurones. Chaque connexion,
effectuée par transfert de molécules chimiques
appelées neuro-transmetteurs, interagissant avec l'ouverture
et la fermeture de canaux ioniques, peut prendre plusieurs
états. Dans le détail, les interactions chimiques
entre neurones sont encore plus complexes. Il en résulte une
capacité combinatoire très importante. Il
n’est d’ailleurs pas exclu qu’on
découvre des interactions encore plus ténues que
ce que l’on appelle aujourd’hui connexion, ce qui
multiplierait encore la capacité combinatoire du cerveau.
Il y aurait lieu d'éclairer mieux les mécanismes
neurologiques qui font de l'homme un esprit curieux, toujours
porté à résoudre de nouvelles
énigmes, avide d'expliquer les chose cachées.
On pourrait y voir une tendance à combattre la mort
cérébrale, au sens où les connexions
qui ne se renforcent pas finissent par s'atrophier et
disparaître.
En tout cas, l’homme est depuis les origines un animal social
et c’est la communication entre individus qui a permis
l’émergence de la pensée conceptuelle
la plus élaborée.
Les percées technologiques dans les moyens de communication
à distance peuvent faire penser que les quelque sept
milliards d’hommes sur la planète sont les
prémisses d’un être pensant unique avec
une combinatoire de l’ordre de dix millions de
milliards de milliards (10 Exp 25) !
2.
L'inconscient
On connaît la localisation d’opérations
réflexes non conscientes, telles la respiration, les
battements du cœur … Pour le moment on ne
distingue pas de mécanismes physiologiques
spécifiques qui seraient dédiés au
subconscient.
3. Pouvoir
créatif du rêve, du mythe, de la
beauté
Jean-Pierre Changeux, reconnaît explicitement le
rôle créatif de l'inconscient et du rêve
dans la recherche scientifique. Il l'applique à la
construction de modèles a priori, méthode
qu’il juge plus féconde que la construction de
modèles a posteriori.
4. La
méthode scientifique
Elle utilise des constructions de l'esprit qui doivent être
en permanence remises en question, confrontées
systématiquement à l'expérience pour
tenter de démontrer qu'elles ne marchent pas (auquel cas
elles sont réputées fausses et
abandonnées) ; en l'absence de réfutation,
n'être prises au sérieux qu'à titre
provisoire et transmises aux générations pour
servir de socle et de tremplin pour aller plus haut.
Jean-Pierre Changeux est obligé de reconnaître
que, dans le monde réel actuel, la communauté
scientifique ne se comporte pas toujours selon cet idéal. A
l'instar des religions et des sectes, elle propage à sa
façon une sorte de pensée mythique.
5.
Conscience et sens moral
Les positivistes soutiennent que c’est par
l’exercice de la conscience ordinaire [elle même
soumise aux mécanismes de renforcement ou
d’inhibition des connexions neurales résultant de
l’apprentissage, des punitions et des récompenses
psychiques correspondant aux afflux de telle ou telle substance
active], que finissent par émerger les états
supérieurs de la conscience ; états que les
philosophes et les religieux ont de tout temps appelé
Conscience, disons plus précisément Conscience
morale.
Ils expliquent qu'il s'agit en fait de notre faculté de
discerner quels comportements il y a lieu d’adopter pour
vivre en paix avec les autres ; leur causer un minimum de mal et
retirer de cette conduite les récompenses psychiques que
nous idéalisons comme un état de bonheur
intérieur, bonheur qui nous aide à supporter les
épreuves de la vie, notamment la souffrance et la mort.
Bref, par le triomphe de la raison, les positivistes
espèrent que le comportement individuel et
collectif pourra évoluer vers des stades plus
avancés.
Par certains aspects, cet espoir est une croyance qui ne
diffère pas fondamentalement de la pensée
mythique qu’ils pourfendent avec vigueur. Ils analysent le
rôle passé de la pensée mythique, et la
réservent avec un certain mépris aux esprits
simples et naïfs. Ils dénoncent le coté
figé des religions établies et le coté
dangereux des idéologies.
Pour conclure dans une optique positiviste, on peut dire que la
conscience humaine est beaucoup plus développée
que celle des animaux supérieurs, sans peut-être
en différer aussi radicalement que le prétendent
certaines traditions philosophiques ou religieuses.
CHAPITRE
IV
Une approche
futuriste
I. L'explosion
technologique du XXéme siècle
1. Impact
sur le savoir-faire
Dans la démarche positiviste les savoirs sont indissociables
des savoir-faire.
Les savoir-faire sont devenus tellement volumineux que la
nécessité de les réunir dans des
approches pluridisciplinaires s'est imposée pour la
poursuite de leur accumulation.
Les domaines qui ont connu les accumulations les plus spectaculaires
sont sans doute : les machines de traitement de l'information
(ordinateurs), les télécommunications, les
sciences de la vie.
2. Impact
sur la communication
La mise en réseau d'une grande variété
de canaux de transport de l'information ouvre une
possibilité d'évolution comparable à
celle qui a résulté de l'invention de
l'écriture et plus tard de l'imprimerie. La communication
s'étend à tous les lieux de la
planète, sans délai de transmission, avec
traduction simultanée dans de nombreuses langues, avec une
possibilité d'interaction entre deux cerveaux distants. La
gestion sur la longue durée de ce stock
pléthorique d'information pose problème. Mais il
faut remarquer que le principe d'indexation des moteurs de recherche
genre GOOGLE ─ basé sur une étiquette
résumant en peu de mots le contenu de chaque page ainsi que
sur le nombre de fois où cette page est lue ─
ressemble beaucoup à ce que nous pouvons savoir des
mécanismes cérébraux.
II. Les
thèses mondialisantes
1.
Englobantes (Hindouisme, Bouddhisme ...)
Tous les êtres vivants sont également
respectables.
Chacun est une partie du Tout
2.
Théocentrique (Teilhard)
L'humanité progresse vers sa réunion à
Dieu selon le message du Christ.
3.
Positivistes (Homo chimicus sapiens)
Grâce aux propriétés de son cerveau,
dépendantes du génome et de la neurochimie,
l'homme est un animal social, doué de raison. Par le libre
exercice de ses fonctions cérébrales
supérieures, il doit tendre vers une situation
pacifiée, où chacun trouvera son bonheur
intérieur en adoptant des comportements
altruistes.
III.
Un
système autorégulé mondial
1. La
sélection Darwinienne à l'œuvre
L'autorégulation implique des processus dynamiques
antagonistes :
créer la nouveauté ←→
éliminer les solutions les moins adaptées.
Les savoir-faire nouveaux dans les sciences de la vie,
l'évolution des modes de transmission des valeurs
traditionnelles, créent de la nouveauté en
abondance. Les mécanismes d'élimination
n'apparaissent pas clairement.
2.
Dictature ou démocratie
Les individus sont tout à la fois semblables et
différents. Toute vie en société
nécessite des règles : imposées par la
force, c'est la dictature avec ses variantes théocratiques;
librement consenties, c'est le contrat social, avec sa variante
pratique la démocratie avec vote majoritaire.
Ces systèmes peuvent-ils être étendus
à la gouvernance mondiale ? Rien n'est moins sûr.
On sera toujours partagé entre libertés
individuelles et efficacité collective. De nouveaux
systèmes plus complexes sont à inventer. Il
semble qu'on soit en train d'essayer une évolution vers la
dictature de l'opinion publique, avec souci d'image des gouvernements
nationaux.
IV.
Génétique des populations
1. Rappel
des règles
Il existe une relation entre la taille d'une population
isolée et sa variabilité
génétique : plus nombreuse la population, plus
faible la variabilité. Le même concept s'applique
probablement aux caractères transmis par apprentissage.
2. Tous
métis
Considérant l'humanité comme une seule
population, hypothèse facilitée par le
développement des transports, les migrations et, sous
certains aspects, les nouveaux outils de communication, on devrait
assister à une augmentation du métissage.
Métissage génétique,
déjà visible au Brésil et aux USA,
métissage culturel déjà visible un peu
partout ( MacDo et CocaCola).
V.
Spécialisations fonctionnelles
1. Les
accumulateurs de ressources
Posons une analogie entre la biologie et l'économie. Il
apparaît que l'accumulation des ressources
nécessite des molécules et des vecteurs
spécialisés.
Pour l'accumulation des ressources énergétiques
nécessaires à l'action : en biologie
l'adénosine triphosphate (ATP), en économie les
capitaux.
Mais il existe une autre ressource importante, indispensable
même, l'information. Comment est-elle accumulée ?
En biologie, par le matériel
génétique, principalement l'ADN ; en
économie, par le savoir-faire stocké
sous forme de méthodes, plans, modes d'emploi, inventions,
brevets ...
2. Les
chercheurs de ressources nouvelles
Avant de pouvoir accumuler une ressource quelconque, il faut se
l'être procurée d'une façon ou d'une
autre.
Les ressources énergétiques proviennent en
dernier ressort du soleil (et très minoritairement de la
radioactivité naturelle terrestre).
Les biens spirituels nous sont apportés par les artistes et
les chercheurs. Des individus plus curieux que la moyenne, plus libres
d'esprit. Les somnambules d'Arthur Koestler : poètes et
prophètes, philosophes et savants, théoriciens et
expérimentateurs.
3. Les
producteurs et les consommateurs
Les producteurs sont aussi les consommateurs. Pour les biens
matériels une double spécialisation se dessine :
par catégorie sociale et par zone géographique.
L'analogie entre le cerveau et l'économie est assez claire :
les échanges, l'interdépendance, la redondance,
sont la règle.
4. Les
prédateurs
Tout système qui prétend à
l'auto-organisation doit pouvoir éliminer les
résidus de son activité. L'élimination
de l'inutile est un rôle ingrat mais indispensable au
fonctionnement du vivant.
VI. Les
bifurcations de l'évolution
1. Risques
anciens
Evolution du climat, catastrophes naturelles ...
Famines, épidémies...
2. Risques
nouveaux connus
Accélération des risques climatiques et
catastrophes naturelles...
Raréfaction de l'eau potable, des sols cultivables,
nouvelles famines ...
Nouveaux virus (SIDA ...), nouveaux prions (K-J ...), nouvelles
allergies ...
Dégénérescences diverses (Altzheimer
...)
Nouveaux dysfonctionnements biologiques, impact de la
prolifération des ondes
électromagnétiques, nouvelles mutations
agressives ...
3. Risques
nouveaux rêvés
Baisse du niveau de sélection des plus aptes, propagation de
tares génétiques,
Emergence d'une race de vieillards égoïstes, ...
Modification de la sexualité, tous homosexuels, baisse de la
natalité, baisse de la population mondiale...
Modification du psychisme acquis, individualisme forcené,
dépendance aux jeux virtuels.
Prépondérance du divertissement non-stop,
modification des modes de transmission de la culture suite à
l'explosion des jeux virtuels violents : écraser l'autre
plutôt qu'aimer et souffrir avec lui, incidence sur les
comportements de l'adulte : jeux d'argent, endettement
inconsidéré, sphère
financière sans limites, traders fous...
VII. Homo finitus
1.
Extinction possible de Homo cybersapiens
Moyens de destruction massive brutaux (armes, génocides ...)
Moyens lents (climat, pollution, génocide culturel ... )
L'extinction des vertébrés terrestres n'est pas
exclue.
2. Une
autre espèce dominante
Retour aux mammifères marins.
Insectes terrestres, plus résistants aux environnements
hostiles.
3.
Qu'adviendra-t-il de la pensée ?
Supposons une espèce dominante genre termite. Les montagnes
de pensée humaine consignée dans les livres et
plus généralement sur les supports papier, bois,
toile... serviront de nourriture énergétique et
non plus spirituelle. Les autres supports pierre,
électronique ... s'effriteront lentement s'ils ne sont pas
entretenus.
C'est la dure loi de l'évolution : toute solution qui n'est
pas utilisée est vouée à la
disparition.
CHAPITRE
V
Une approche mixte
Appliquez vous à
garder en toutes choses le juste milieu
Confucius
1.
Concepts.
Donnons à ce mot le sens restrictif de construction de
l'esprit humain. Il importe alors de connaître, autant que
faire se peut, les caractéristiques et les limites du
fonctionnement de notre cerveau, de notre corps, sans doute aussi de
notre corps social. Notamment connaître les
caractéristiques de la communication entre les personnes.
Sous réserve d'une bibliographie plus approfondie, il semble
qu'il y ait des filtres à la réception des
messages (étiquettes) et probablement des limites pratiques
à notre entendement. Comme si, en dépit de sa
merveilleuse complexité, notre cerveau,
réputé le siège principal des
fonctions cognitives, était obligé de
modéliser la complexité du monde
extérieur en utilisant des ressources limitées.
Ces ressources limitées de notre cerveau sont
utilisées à la fois pour la pensée
conceptuelle et pour l'action. Ce sont les mêmes processus,
les mêmes neurones. Peut-être il y a-t-il aussi une
dépense d'énergie par unité de temps
limitée par les caractéristiques du
métabolisme cérébral.
D'où deux cas de figure extrêmes possibles :
- priorité à la réflexion :
j'appréhende le complexe en évaluant le pour et
le contre, la thèse et l'antithèse, et in fine je
ne m'engage pas dans l'action.
- priorité à l'action : j'agis sans tarder et je
réagirai en fonction des circonstances découlant
de ma première action.
Il est clair que selon son tempérament, selon ses
capacités, mais aussi selon les circonstances, selon les
âges de la vie, chacun utilise un dosage
intermédiaire entre ces deux extrêmes.
2. Le vrai et le faux
Ce concept n’est pas évident. Le sens commun est
que le vrai est une affirmation prédictive qui va pouvoir
être constatée par
l’expérience
répétée et constante.
Pour les affirmations portant sur des objets matériels
à notre échelle, les choses sont en
général claires. Si je mets une casserole pleine
d'eau sur le feu, l'eau finit par bouillir.
Déjà quand on change
d’échelle, que ce soit vers le très
petit ou vers le très grand, la vérification
expérimentale devient moins évidente. Aux
extrêmes, elle fait appel à des constructions de
l’esprit, appelées théories. Une
théorie généralement admise par le
plus grand nombre est appelée paradigme. De temps en temps
un paradigme est mis en défaut par une nouvelle
expérience et doit être remplacé par un
autre, ou, plus fréquemment, complété
et amélioré.
Mais quand on passe à des affirmations portant sur des
objets immatériels, la vérification est par
essence non objective. Elle relève du
dénombrement statistique des convictions et des
croyances.
Cependant, en fonction de l'époque, certaines affirmations
conceptuelles s'imposent à tous comme des
évidences. Par exemple l'affirmation : " L'Etat sait
anesthésier le peuple, le rendre plus malléable.
Toutes sortes de drogues lui sont administrées :
télévision, vidéo(thèque),
informatique, sans oublier le tabac et l'alcool qui remplissent les
caisses des gouvernements " paraît
largement admise en ce début du XXIème
siècle.
A signaler, pour être complet, que certains spiritualistes
avancent d'autres conceptions de la vérité que
l'on pourrait qualifier de théosophiques ou "essentielles"
<< La Vérité n'est pas discutable
en elle-même. Par définition elle est.
>> . Ce dogme résume en peu de mots ce que les
positivistes reprochent aux spiritualistes : bloquer tout
développement intellectuel, voire tout
développement spirituel.
3. Donner un sens
à la vie.
Si nous n'étions pas mortels y penserait-on ? Si nous
n'avions pas conscience de notre place dans les
générations passées et futures
(généalogie, humanité), y
penserait-on? D'un autre coté, on observe que chaque homme,
animal social et spirituel, en éprouve le besoin.
4. Le Bien et le Mal.
On est dans le domaine de la morale, c'est à dire des
règles de comportement qui permettent la vie en
société. A la base, ce qui permet la vie en
société c'est ce qui assure la survie du groupe,
la survie de l'espèce. Tout comportement, individuel ou
collectif, suicidaire pour la survie de l'espèce est
associé à l'étiquette du Mal.
Or, chaque individu perçoit avec certitude le mal qu'on lui
fait (douleur physique ou morale) et éventuellement les
états de bien-être,
félicité, bonheur ( cf la philosophe Simone
Weil). Passer de ce particulier perceptible par un individu
à la projection dans le ressenti d'un autre, puis
à la survie de l'espèce est assez merveilleux. Si
cette connaissance du Bien est innée, comme le pensent
certains spiritualistes , on peut raisonnablement admettre
que cela relève du Principe Universel qui régit
le monde réel et en particulier le vivant. Si cette
connaissance résulte du plus haut niveau de communication
entre les hommes, même s'il est dominé par la
neurochimie du cerveau, portons-la au crédit des lois de la
chimie, ce qui revient au même que la conclusion
précédente.
5. Promotion du
Bien.
Spinoza, qui fut accusé d'être un positiviste
avant l'heure, fait remarquer que la seule connaissance du Mal c'est
déjà le Mal. L'homme bon doit se concentrer sur
la pratique du Bien et sa mise en valeur par le discours.
6. Révélation, Témoins
Les grands témoins sont des personnages éminents
qui, souvent en réaction aux misères ou aux
dérives de leur époque, ont su faire passer des
messages d'espoir et de réforme. Certains ont
expliqué comment ils avaient pris conscience de leur mission
de révélation.
Mais il y a aussi une foule de plus petits témoins, tous
aussi impressionnants quand on y réfléchit, parce
qu'ils sont plus proches de nous.
Les messages des grands témoins les plus anciens ont
été recueillis oralement par des tiers, mis par
écrit souvent assez longtemps après les faits,
transcrits, traduits par des générations de
scribes. Ils peuvent être ambigus, voire contradictoires.
Mais ils doivent frapper l'auditeur puis le lecteur, d'où
les paraboles. "Les mots de l'allégorie sont obscurs...
L'Ecriture Sainte est susceptible de commentaires infinis; c'est
pourquoi elle peut survivre aux
millénaires ".
Le cas de Jésus est singulier. Selon les
évangiles, il s'est constamment
réclamé de son Père et, plus rarement,
de l'Esprit Saint, ... mais peut être
l'ambiguïté des langues sémitiques
Araméen et Hébreu ancien, les filtres dans la
communication avec les Juifs et surtout les Grecs puis les Latins
ont-il joué.
Quoiqu'il en soit, c'est ce même Jésus qui a
renforcé l'individualisme ( par la promesse du salut
individuel ), le germe de la démocratie
à l'occidentale ( par la notion des premiers qui seront les
derniers ) et les prémisses de l'humanisme ( par la notion
du prochain et de l'Homme Nouveau, qui, plus tard, se
concrétiseront par les formules "tu as vu ton
frère, tu as vu ton Dieu" et "homo homini deus").
Ces germes étaient-ils apparus avant Jésus ? Je
n'en sais rien. Disons qu'il les a semés avec vigueur et
dans le but explicite de récolter un jour.
7.
Spiritualités et Religions
Je distinguerai spiritualité de religion.
Par leur enseignement, les grands témoins ont
posé les bases de nouvelles spiritualités. Ou
plutôt les inflexions de la spiritualité
générale de l’humanité.
L’individu le plus froid, le plus flegmatique a fait au moins
une fois dans sa vie l’expérience d’une
émotion qui l’a amené à
s’interroger sur soi et sur l’autre.
Chacun ressent un besoin de recherche spirituelle ou
d’engagement pour donner, comme on dit maintenant, du sens
à sa vie.
Peut-être, parce que cette activité mentale
procure une sensation de bien-être. Ce qui serait une autre
manifestation du Principe Universel qui régit le
fonctionnement de l’homme.
Mais force est de constater que les hommes libres et égaux
en droit, libres et égaux devant Dieu, ne sont pas tous
également doués pour toutes les
activités terrestres. Il y a des costauds et des
physiquement limités, des grands esprits et des petits QI,
etc. L’exercice du libre arbitre de chacun
s’accompagne de toutes sortes de limitations. Une religion,
c’est le système, l’organisation, qui
permet à l’ensemble de ses adeptes, chacun selon
ses dons, de suivre la voie tracée par le grand
témoin fondateur.
Malgré l’engagement des petits témoins
successifs, leur martyre parfois, la bonne volonté des plus
humbles, les religions s’adaptent pour que le message soit
compris du plus grand nombre et que les pratiquants soient nombreux et
disciplinés. Dans celle que nous connaissons le moins mal,
on trouve depuis des quasi idoles, comme sainte Rita,
jusqu’à des constructions de l’esprit
ultra sophistiquées, comme les quatre lectures de
l’Ecriture Sainte .
Les religions aident à vivre, en particulier dans
l’adversité et dans la douleur, elles aident aussi
à mourir. Toutes capitalisent largement sur la
réaction naturelle de chacun face à la souffrance
et à la mort.
8. Voies vers la
connaissance, expériences mystiques,
accès à la «
Réalité », voies de l’effort,
voies de l’étude, recherche spirituelle.
Spéculer sur une fusion finale de
l’Humanité avec la Divinité peut
paraître un péché d’orgueil,
en tous cas relever de l’anthropocentrisme.
Spéculer sur la nature intrinsèquement mauvaise
du corps, qui nous aurait été infligé
comme une punition , me paraît relever du masochisme. Le "moi
haïssable" de Pascal est à prendre avec
précautions.
Heureusement, ces deux attitudes de pensée ne sont pas
à la portée du plus grand nombre, car, si
c’était le cas, l’issue finale ne serait
peut-être pas à la hauteur des
espérances.
A l'inverse, mettre sa foi uniquement dans la pensée
positive et le culte de la raison est une voie gourmande en
énergie, que peu d'individus peuvent pratiquer exclusivement
et surtout dont l'efficacité en termes de progrès
pour l'humanité est loin d'être
démontrée par l'expérience.
Je préfère pour ma part une approche plus
modeste. En rester aux voies de l’effort et de
l’étude, « sans attendre
d’autre récompense que celle de savoir que nous
faisons votre Sainte Volonté».
Paris, mars 2008